Les inhibiteurs de l’angiotensine II (inhibiteurs de l’enzyme de conversion) donnés au cours du premier trimestre de la grossesse sont-ils néfastes pour le fœtus ? Une étude de cohorte rétrospective nord-américaine répond à cette question.
La question est importante puisque les inhibiteurs de l’enzyme de conversion sont les antihypertenseurs les plus prescrits au monde et que presque la moitié des grossesses ne sont pas planifiées : le risque d’exposition en début de grossesse n’est donc pas négligeable.
De façon générale, on sait qu’on manque d’études bien menées concernant les effets tératogènes potentiels de la plupart des antihypertenseurs et il suffit d’ailleurs de lire les notices accompagnant les boites de médicaments pour s’en convaincre puisque la plupart précisent que la molécule correspondante n’a pas été étudiée durant la grossesse. Concernant les inhibiteurs de l’angiotensine II (sartans) il est admis que leur administration aux deuxième et troisième trimestres de la grossesse est dommageable pour le foetus (anomalies cardiaques congénitales et non fermeture du tube neural) ce qui motive à juste titre leur contre indication durant la grossesse. En revanche, leur risque au premier trimestre est peu documenté. Certaines données ont laissé entendre l’existence d’une possible augmentation du risque de dommage fœtal, non retrouvée avec les autres antihypertenseurs.
En étudiant les données d’une vaste base de données capable de faire le lien entre prescriptions pendant la grossesse et état du nouveau né, sur 465 000 paires femmes-enfants, Li et collaborateurs ont étudié l’impact foetal des antihypertenseurs (prescrits dans 2,4 cas sur 1000) dont les sartans (0,9/1000). Le risque de malformation fœtales a été considéré chez les femmes ayant reçu uniquement des sartans au premier trimestre et les femmes traitées également avec d’autres antihypertenseurs, comparé à deux groupes : des femmes classées hypertendues mais n’ayant pas eu de traitement antihypertenseurs durant le premier trimestre et des femmes non hypertendues.
Pas de sur-risque comparé aux autres traitements antihypertenseurs
Comparées à la population « normale », les données concernant les femmes ayant été traité par des sartans montrent la présence d’un faible risque de malformations. Mais ce risque ne distingue pas de celui du groupe des femmes prenant d’autres antihypertenseurs. Les auteurs en concluent que les sartans donnés au premier trimestre n’exposent donc pas un à sur-risque comparés aux autres traitements antihypertenseurs et que ces résultats suggèrent que c’est l’hypertension en elle même qui peut expliquer le sur-risque. Ces données sont donc rassurantes. Certes une étude de cohorte rétrospective n’est pas le moyen idéal pour étudier la toxicité d’une molécule. Mais, comme le font remarquer les auteurs, un essai prospectif qui consisterait à donner volontairement des sartans à des femmes enceintes n’est pas éthiquement envisageable. Ce travail est disponible en open-access puisque le British Medical Journal en autorise la reproduction dans un contexte non commercial. Aussi sfhta.org vous propose d’accéder ici au texte original d’un simple clic
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Rédaction Nicolas Postel-Vinay pour sfhta.org
Références :
- De-Kun Li, Chunmei Yang, Susan Andrade, Venessa Tavares, Jeannette R Ferber Maternal exposure to angiotensin converting enzyme inhibitors in the first trimester and risk of malformations in offspring : a retrospective cohort study. BMJ 2011 ;343 :d5931
- Fetal risk from ACE inhibitors in the first trimester. Evidence is reassuring, but risks remain from the hypertension itself Allen A Mitchell. BMJ 2011 ;343 :d6667 doi : 10.1136/bmj.d6667
Mise en ligne octobre 2011